Jours merveilleux au bord de l’ombre, Rose-Marie Pagnard, Zoé 2016
Quelle tête, énorme, fantasque, se balade sur la page, stylo en main, pour y faire danser un petit monde singulier, issu d’un shtetl ? Il y a bien le professeur de violon Schwartz. Il y a bien le triangle des Jakob : Jacob le vieux mis à l’écart dans l’hôtel Corsair. Jacob Jakob le propriétaire d’une usine dédiée à la production d’engins pyrotechniques, menteur, voleur, et maître d’une petite ville. Davitt Jacob, celui qui s’est fait rouler par le précédent, le doux, le silencieux, qui a une belle épouse et deux enfants Dobbie et Brun. Mais ce n’est pas ça !
Il y a aussi Mato Graf espèce de comte polygraphe, Kari Mat écrivain manqué qui interprète mal Don Quichotte, mais personne que je sache ne porte le casque plat à barbe et ne combat les moulins, dans cette histoire, à moins que…
A moins que ne tournent les moulins et que seul, Davitt, perçoive qui est Don Quichotte avec sa « triste mine de chevalier errant (…) cette figure aussi bonne que laide est le résultat d’un mariage entre un sentiment et une vision : le sentiment de l’humain infiniment petit et infiniment sublime, la vision du surhumain infiniment grand et éternel. (…) Ce mariage donne une mélancolie, quelque chose comme un amourachement des difficultés de la vie, de ce qu’il faut sauver et défendre en dépit des coups sur le crâne et sur l’âme… » p 158
Davitt serait Abel, Raüben serait Caïn, c’est pour sauver la réputation du premier et empêcher le deuxième de nuire, que tous se démènent. A la façon de Sancho Pansa.
On y chevauche la morale, le conte, la musique, la dérive, le charme d’une volée de réminiscences littéraires, musicales. Tout dérive, les hommes, les choses, leurs pensées, les paysages, les mots et les phrases musiques, la musique elle-même qui se renouvelle.
« Merveilleuse légèreté »
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